Alors que de nombreuses études comme celle d’UFC que Choisir souligne le manque de fiabilité des DPE, Hello Watt a mené l'enquête sur plus de 200 logements pour savoir si ces logements avaient une consommation d’énergie, mesurée par les compteurs communicants Linky et Gazpar, qui correspondaient à la consommation prévisionnelle associée à leur DPE, pour les logements disposant d’un DPE récent.

Les résultats sont surprenants.

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En résumé :

  • Suite à plusieurs retours sur notre étude originale, nous avons précisé notre approche, en démontrant notamment le manque de corrélation entre le DPE et la consommation d'énergie sur un grand nombre de logements (400). Retrouvez ici notre nouvelle étude.
  • Avec la loi Climat, les “passoires thermiques” (logements avec une étiquette F ou G) sont progressivement interdites à la location à partir du 1er janvier 2023.
  • Une étude d’Hello Watt effectuée sur plus de 200 logements montre toutefois que 71 % des DPE ne correspondent pas à la consommation d'énergie qu'on peut mesurer avec les compteurs communicants Linky et Gazpar.
  • Dans 29 % des cas, la consommation réelle mesurée correspond à la consommation estimée à partir du DPE
  • Dans 40 % des cas, il y a une note d’écart entre la consommation estimée et la consommation mesurée
  • Dans 31 % des cas, il y a 2 étiquettes d’écart, voire plus, ce qui représente un écart très important et sur une grand nombre de cas.
  • En attribuant une note au hasard (en tenant compte des grands équilibres déjà connus), on arriverait quasiment aux mêmes résultats. Soit 25 % de DPE justes en aléatoire, contre 29 % dans la réalité.
  • Hello Watt mesure le même nombre de logements ayant un DPE trop haut que trop bas : 78 sur-évalués (consommation sur-évaluée par rapport à la consommation réelle), 64 exacts et 79 sous-évalués.
  • Plusieurs causes peuvent expliquer ce problème de fiabilité, comme le manque d’informations sur le bâti, l’usage du logement qui aurait un impact sur la consommation bien plus élevé que les caractéristiques thermiques du logement, et le m anque d’encadrement et de formation des diagnostiqueurs, éléments déjà mis en avant dans les autres études, comme celle d’UFC que choisir qui montrait le manque de fiabilité des DPE sur un échantillon plus restreint de 7 logements.
  • L'étude a été faite avec des DPE de la méthode 3 CL effectués depuis juillet 2021.

Quelques exemples de logements étudiés

Voici 3 exemples de logements étudiés par Hello Watt :

  • Un appartement de 25m² à Caen, chauffage électrique : son DPE estime une consommation de 359 kWhEP/m2 (étiquette F), alors que Linky mesure 110 kWhEP/m2 (étiquette B).
  • Une maison de 120m² à Gragnague (31), chauffage électrique : son DPE estime une consommation de 67 kWhEP/m² (étiquette A), alors que Linky mesure 162 kWhEP/m², correspondant à l'étiquette D.
  • Un appartement de 45m² à Marseille, chauffage électrique : son DPE estime une consommation de 441 kWhEP/m2 (étiquette G), alors que Linky mesure 149 kWhEP/m2 (étiquette C).

graph 5

Correspondance entre le DPE et la consommation d’énergie

Classes énergétiques

Consommation estimée par le DPE

Classe A

moins de 70 KWh/m² par an

Classe B

71 à 110 KWh/m² par an

Classe C

111 à 180 KWh/m² par an

Classe D

181 à 250 KWh/m² par an

Classe E

251 à 330 KWh/m² par an

Classe F

331 à 420 KWh/m² par an

Classe G

plus de 421 KWh/m² par an

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Comment l’étude a-t-elle été réalisée ?

Base de données de l’ADEME

Nous avons téléchargé le jeu de données des DPE de l’ADEME.

Dans sa dernière version 3CL-2021, le DPE estime les besoins énergétiques d’un logement dans cinq domaines :

  • chauffage ;
  • eau chaude sanitaire (ECS) ;
  • climatisation ;
  • éclairages ;
  • auxiliaires (notamment de chauffage et ventilation).

L’objectif principal des DPE est de prioriser les rénovations et d'accélérer la transition énergétique. Il est donc lié à l'efficacité énergétique du bâtiment, et considère un usage standard pour le comportement des occupants.
Par exemple, le chauffage est supposé être contrôlé par un thermostat à 19°C. Des hypothèses sont également faites sur la météo, l’utilisation de l’ECS, les périodes d’absence etc. Le DPE ne prend pas non plus en compte d’autres usages ​énergétiques comme les ordinateurs, télévisions, l'électroménager ou la cuisine. Cependant, selon l’ADEME, les usages pris en compte par le DPE totalisent environ 66% de la consommation énergétique d’un logement moyen. Nous nous attendons donc à observer une corrélation claire entre le DPE et la consommation.

Base de données Hello Watt

Hello Watt collecte les données de consommation rapportées par les compteurs communicants de gaz et d'électricité de ses utilisateurs. Bien que ces deux ́énergies soient exprimées en kWh, le DPE s’intéresse à l'énergie primaire, soit l'énergie contenue dans les carburants bruts avant d’avoir été 3 soumis à l'ingénierie des réseaux de production et distribution.

Par conséquent, les consommations rapportées sont transformées avant d'être ajoutées ensemble pour obtenir une quantité d'énergie primaire qui peut être comparée à celle estimée par le DPE.

Le jeu de données de Hello Watt contient également des métadonnées sur les logements comme leur adresse, surface, et l'énergie principale utilisée pour le chauffage et le chauffage de l’eau. De cette étude sont exclus les logements qui :

  • ont moins d’un an de données historiques connues en consommation électrique,
  • ou ont moins d’un an de données historiques connues en consommation de gaz, et qui ont déclaré se chauffer au gaz.

Nous effectuons ensuite une jointure sur les codes INSEE qui sont des identifiants géographiques numériques. L’adresse postale est normalisée de la même façon dans les deux jeux de données, puis une correspondance exacte entre les adresses normalisées est requise pour qu’une correspondance soit établie.

Une unique adresse postale peut héberger plusieurs logements. Une fois qu’une correspondance potentielle entre un DPE ADEME et une consommation Hello Watt est identifiée, une série de vérifications additionnelles est effectuée pour vérifier que les deux enregistrements correspondent au même logement.

Résultats de l’étude

Pas de corrélation évidente entre le DPE obtenu depuis la base de données ADEME et le DPE basé sur la consommation réelle

Pour chaque logement identifié de façon fiable dans les jeux de données Hello Watt et ADEME, nous calculons la consommation d'énergie primaire à partir de la consommation réelle mesurée par les compteurs connectés, et en déduisons l'étiquette DPE correspondante. Il n’y a pas de corrélation évidente entre le DPE obtenu depuis la base de données ADEME et le DPE basé sur la consommation réelle.

Parmi les 221 logements qui ont été identifiés, 29 % sont classés dans la même classe DPE avec les deux méthodes, 40 % sont classés dans des classes adjacentes, et 31 % dans des classes ni identiques ni adjacentes.

Graph 4

Des DPE pas beaucoup plus précis que si la lettre du DPE était attribuée au hasard

Si on imaginait un diagnostiqueur peu scrupuleux qui attribuerait les étiquettes au hasard (en respectant la répartition nationale et sans même regarder le logement), il aurait bon dans 25% des cas (vs 29% ci-dessus) !

En conséquence, il y a urgence à améliorer la fiabilité des DPE, ce qui passe par une meilleure formation et un meilleur encadrement de la filière, qui est encore jeune.

Autant de sur-estimations que de sous-estimations

Hello Watt mesure le même nombre de logements ayant un DPE trop haut que trop bas :

  • 78 sur-évalués (consommation sur-évaluée par rapport à la consommation réelle) ;
  • 64 exacts ;
  • 79 sous-évalués.

Côté sur-estimations : 20 logements sont E, F, G alors que selon leur consommation ils auraient dû être en A, B ou C.

Côté sous-estimations : 13 logements sont A, B ou C alors qu'ils devraient être E, F ou G selon leur consommation réelle.

Comment expliquer cette discordance ?

Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette discordance. Des explications plausibles seraient :

  • La méthode 3CL utilisée pour estimer les propriétés des bâtiments n’est pas assez précise, ou possède un biais interne qui rend son résultat peu fiable même lorsque la méthode est appliquée correctement.
  • La méthode 3CL elle-même est fiable, mais les professionnels qui l’appliquent prennent des raccourcis pour réduire sa complexité, ou ne l'implémentent pas de façon fiable pour une autre raison.
  • Les données DPE collectées par l’ADEME sont une représentation fiable de la performance énergétique des logements, mais les hypothèses faites sur le comportement des occupants sont irréalistes, et la variabilité d’un occupant à l'autre noie tout impact significatif dû bâtiment lui-même sur la consommation.

FAQ sur le DPE et la location des logements

Quelles sont les évolutions du DPE concernant la location d’un logement ?

La première échéance de la loi Climat stipule que la location des “passoires thermiques” (logements dont l’étiquette énergétique va de F à G) est interdite dès le 1er janvier 2023. Plus que jamais, le DPE est un diagnostic indispensable dans la vente ou la location d’un bien.

Comment est calculé le DPE ?

Le DPE se base sur la projection de la consommation énergétique d’un bien au vu de ses caractéristiques (telle que l’épaisseur de ses murs ou encore sa superficie).

Le DPE est-il fiable ?

D’après une étude UFC Que Choisir, corroborée par l’étude d’Hello Watt, le DPE n'est pas fiable actuellement. En effet, entre la consommation énergétique réelle d’un logement et la consommation indiquée par le DPE, il y a souvent d'importants écarts, allant parfois jusqu’à 3 classes différentes !

Aliénor Guibert
Aliénor Guibert

Rédactrice experte rénovation énergétique

Après des études littéraires et commerciales, Aliénor rejoint Hello Watt en 2021 et se spécialise dans la rédaction d’articles et de billets de blog sur la rénovation énergétique et les primes énergie.