Vers un démantèlement des aides pour le photovoltaïque résidentiel ?

Le gouvernement Bayrou veut économiser sur le soutien au photovoltaïque résidentiel

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a annoncé, le 29 janvier, le report de la publication des primes et tarifs de rachat devant s’appliquer du 1^er février au 30 avril 2025. Une décision prise à la demande du gouvernement, qui travaille sur une refonte des dispositifs de soutien au solaire photovoltaïque. 

Faut-il s’attendre à un coup de rabot sur les futures installations solaires résidentielles ?

Quelques indices avaient déjà été distillés par Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’énergie, lors d’une séance publique au Sénat, le 20 janvier 2025. Il a affirmé le besoin de “rationaliser le soutien aux énergies renouvelables” dans un cadre budgétaire contraint. Le ministre a particulièrement visé le segment résidentiel, de 0 à 9 kWc, en déclarant vouloir recentrer les aides sur les installations “plus efficaces”. 

Marc Ferracci a également annoncé une économie de 214 millions d’euros en 2025, ce qui n’a pas manqué de semer l’inquiétude dans le secteur photovoltaïque. Ce montant correspond en effet à la suppression de la prime à l’autoconsommation pour les particuliers. 

Prime à l’autoconsommation et tarifs de rachat : une suppression pure et simple est envisagée

Dans une consultation clôturée le 27 janvier, le gouvernement Bayrou a confirmé envisager une refonte des aides au photovoltaïques, avec quatre scénarios sur la table : 

• la suppression de la prime à l’autoconsommation ; 
• la suppression des tarifs de rachat ; 
• la division par deux, voire plus, des tarifs de rachat ; 
• la suppression de la prime et des tarifs de rachat. 

Les professionnels dénoncent une erreur stratégique

Laetitia Brottier, vice-présidente du syndicat Enerplan, qui défend les intérêts des professionnels de l'énergie solaire, a rappelé que le solaire résidentiel a le coût de soutien le plus faible du guichet ouvert photovoltaïque, le système permettant de revendre l’électricité produite sur le réseau. 

Elle souligne également le bilan fiscal positif pour l’État du photovoltaïque résidentiel. En 2025, installer un gigawatt générerait 309 millions d’euros de TVA et 273 millions d’euros de cotisations sociales, pour un coût de soutien de 157 millions d’euros. 

Dans un communiqué commun publié le 30 janvier, Enerplan et le Syndicat des énergies renouvelables (SER), ont rappelé que le secteur du solaire emploie aujourd’hui 67 000 personnes, pour plus de 2 milliards d’euros de recettes fiscales annuelles, dont 85 millions d’euros qui reviennent aux collectivités locales. 

L’avis d’Hello Watt : mieux cibler les aides et privilégier une baisse de la TVA

Mieux cibler les aides 

Avec l’essor du solaire résidentiel, la prime à l’autoconsommation pèse de plus en plus lourd sur le budget de l’État. Actuellement attribuée sans distinctions de revenus, elle bénéficie en majorité à des ménages aisés, pourtant moins affectés par l’augmentation des prix de l’énergie. 

Le solaire photovoltaïque, à la différence du solaire thermique, n’est pas inclus dans le dispositif d’aides à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’, qui subventionne exclusivement les ménages aux revenus très modestes, modestes et intermédiaires. 

En intégrant les aides au photovoltaïque dans MaPrimeRénov’, ou en instaurant des critères de ressources, le gouvernement pourrait rationaliser la dépense publique tout en maintenant un soutien financier pour les ménages qui en ont le plus besoin. 

Privilégier une baisse de la TVA 

Le solaire en France est loin d’être trop aidé : il est même moins aidé que les chaudières à gaz ! À l’heure actuelle, la TVA appliquée aux installations de plus de 3 kWc (environ 8 panneaux) est de 20 %, un niveau parmi les plus élevés d’Europe. 

En France, seules les installations de moins de 3 kWc bénéficient d’une TVA réduite à 10 %, tandis que les installations de plus de 3 kWc sont soumises à un taux de TVA classique à 20 %. Pourtant, les particuliers sont de plus en plus nombreux à opter pour des installations d’une puissance supérieure à 3 kWc pour couvrir des besoins électriques croissants (véhicules électriques, pompes à chaleur…). 

Aujourd’hui, les travaux de rénovation énergétique, dont le solaire thermique, bénéficient d’une TVA à 5,5 %, mais les panneaux solaires photovoltaïques en sont exclus. Les chaudières à gaz bénéficient même d’une TVA à 10 %, une grave incohérence au regard des enjeux de transition énergétique des logements. 

Hello Watt milite donc pour une TVA réduite à 5,5 % pour toutes les installations photovoltaïques résidentielles de moins de 9 kWc, éventuellement conditionnée au pilotage de l’installation. Cette baisse serait largement compensée par la fin des techniques frauduleuses de récupération de TVA, et par le plus grand nombre d'installations qui en résulterait. 

Un article du projet de loi de finances 2025, étudié cette semaine à l’Assemblée, prévoit de permettre l’application d’une TVA à 5,5 % sur le photovoltaïque résidentiel d’ici octobre 2025. Cette mesure reste soumise à l’adoption définitive du projet de loi. 

Subventionner le pilotage des installations : un levier sous-exploité

Le gouvernement justifie la baisse des aides visant le secteur résidentiel sous prétexte qu’il serait difficilement pilotable. Pourtant, le photovoltaïque résidentiel est un segment facilement pilotable. 

Avec un tarif de rachat bien inférieur au prix du kWh prélevé sur le réseau, les ménages pilotent déjà leurs usages pour maximiser leur taux d’autoconsommation. Ils décalent leurs usages, chargent leur véhicule électrique pendant les heures de production, ou encore utilisent un routeur solaire pour alimenter leur chauffe-eau lorsque leur production dépasse leurs besoins. 

Pourtant, aucune aide ne finance les outils de suivi ou les solutions de stockage, qui jouent un rôle clé dans le pilotage. Les batteries notamment, amenées à devenir très performantes dans les prochaines années, pourraient être intégrées dans un système d’aides cohérent pour maximiser le pilotage des installations résidentielles. 

Notre conseil aux particuliers

Hello Watt conseille aux particuliers de ne pas attendre pour équiper leur logement de panneaux solaires. Depuis août 2023, les aides diminuent chaque trimestre, et comme nous venons de le voir, elles pourraient être supprimées purement et simplement dans les mois à venir.