Batteries virtuelles : sont-elles aussi rentables que la revente du surplus à EDF OA ?

Petit rappel : qu’est-ce que la revente du surplus et le stockage virtuel ?

Revente du surplus

La revente du surplus permet de vendre à un fournisseur le surplus d’électricité produit par des panneaux solaires qui n’a pas été consommé. L’électricité excédentaire est alors injectée sur le réseau et vendue. EDF Obligation d’Achat (EDF OA) est la filiale d’EDF obligée d’acheter cette production à un tarif fixé pour 20 ans. D’autres fournisseurs peuvent également racheter le surplus, mais sans garantie tarifaire à long terme.

Stockage virtuel

Le stockage avec des batteries virtuelles consiste à réinjecter l’électricité produite non consommée sur le réseau en la comptabilisant. Cette électricité réinjectée peut ensuite être utilisée à un autre moment, notamment la nuit, lorsque les panneaux photovoltaïques ne produisent pas, moyennant des coûts d’abonnement ou de frais d’acheminement.

Ce format de stockage n’est proposé que par un nombre restreint d’acteurs. En France, ce sont les entreprises JPME, MyLight Systems et Urban Solar Energy qui proposent ce service.

Rentabilité des batteries virtuelles : nos hypothèses de calcul

Nous avons étudié la rentabilité des systèmes de batteries virtuelles pour une installation avec les paramètres suivants : 

• puissance installée : 6 kWc ; 
• localisation : Nîmes ; 
• investissement initial : 13 500 € ; 
• consommation du foyer : 6 600 kWh par an ;
• production : 8 995 kWh par an ; 
• sur une durée de 20 ans. 

Nous avons analysé deux solutions proposées par quatre acteurs : 

1. la revente du surplus : proposée par EDF OA, JPME et Urban Solar Energy ; 
2. la batterie virtuelle : proposée par JPME, Urban Solar Energy et MyLight Systems.

Pour chaque solution, nous avons appliqué deux hypothèses de taux d’autoconsommation : 30 % et 60 %. 

Nous n’avons pas pris en compte le coût de l’abonnement à la fourniture d’électricité, mais nous détaillons plus bas les coûts d’abonnement proposés par JPME, Urban Solar Energy et MyLight Systems.

Opter pour une offre de batterie virtuelle avec ces acteurs implique en effet de les choisir comme fournisseur d’électricité, contrairement à la revente du surplus, où le contrat de rachat est indépendant de la fourniture d’électricité. 

La batterie de MyLight Systems est une batterie à stockage limité. Les clients souscrivent un abonnement, dont le prix varie en fonction du volume de stockage choisi. Nous intégrons donc dans nos calculs, pour cette batterie virtuelle, l’hypothèse de 20 % de pertes générées en cas de mauvais dimensionnement de l’abonnement ou d’augmentation de la production. 

Rentabilité avec un taux d'autoconsommation de 30 %

1. Gains totaux : coûts évités et revenus de la revente s’il y a

2. Coûts totaux : coûts d’entrée et coûts variables annuels sur 20 ans

Clé de lecture pour la 1^ère ligne du tableau : pour une production de 8 995 kWh par an, à Nîmes, sur une base de 20 ans, un particulier peut gagner 38 581 € (coûts évités sur sa facture d’électricité et revenus de la vente) moyennant un coût de 0 € en souscrivant un contrat de revente avec EDF OA. 

À noter que la valorisation du kWh correspond à l'argent gagné ou économisé pour chaque kWh d'électricité produit, que ce soit en le vendant à un fournisseur, en l'auto-consommant, ou en le stockant

Rentabilité avec un taux d’autoconsommation de 60 %

1. Gains totaux : coûts évités et revenus de la revente s’il y a

2. Coûts totaux : coûts d’entrée et coûts variables annuels sur 20 ans

Clé de lecture pour la dernière ligne du tableau : pour une production de 8 995 kWh par an, à Nîmes, sur une base de 20 ans, un particulier peut économiser 55 944 € sur sa facture d’électricité moyennant un coût de 2 768 € en souscrivant à l’offre de batterie virtuelle de JPME. 

Les batteries virtuelles de JPME et Urban Solar Energy sont aussi rentables que la revente à EDF OA 

Notre analyse croise deux données essentielles pour évaluer la rentabilité des solutions de stockage : 

1. la valorisation du kWh par solution ; 
2. l'année de retour sur investissement. 

À la lumière de ces critères, les solutions les plus intéressantes sont : 

• la revente de surplus à EDF OA (solution la plus stable et sûre) ; 
• les batteries virtuelles d’Urban Solar Energy et de JPME. 

Ces trois solutions présentent un retour sur investissement entre 7 et 8 ans selon les scénarios, avec une valorisation plus élevée du kWh.

La revente du surplus aux acteurs du stockage virtuel est moins rentable et plus instable

Nous avons également évalué la rentabilité des offres de revente du surplus proposées par JPME et Urban Solar Energy. Elles se révèlent moins rentables que la revente à EDF OA et les offres de batterie virtuelle, à l’exception des offres de revente du surplus de JPME, mais sous réserve d’un taux d’autoconsommation élevé (60 %). 

Il faut aussi prendre en compte que les tarifs de rachat de JPME et Urban Solar Energy changent tous les ans. Cela rend la revente du surplus à des acteurs autres qu’EDF OA particulièrement instable.

Dans quels cas choisir la revente du surplus à EDF OA ?

Avantages

• EDF OA, filiale du fournisseur historique, garantit une sécurité inégalée avec un tarif de rachat fixe garanti sur 20 ans ; 
• la revente à EDF OA permet de bénéficier de la prime à l’autoconsommation : en août 2024, elle représente une aide de 780 € pour une installation de 3 kWc et de 1 140 € pour une installation de 6 kWc. 

Inconvénients

• Le contrat avec EDF OA engage le particulier pour une durée 20 ans, sans possibilité de résiliation à moins d’une procédure complexe accompagnée de pénalités financières ;
• il est obligatoire de faire appel à un installateur qualifié RGE (reconnu garant de l’environnement) et d’installer les panneaux en toiture pour pouvoir bénéficier de l’obligation d’achat par EDF ;
• EDF OA est entièrement détenu par l’État et dépend donc des orientations politiques des gouvernements en matière d’énergie renouvelable. 

Dans quels cas choisir les batteries virtuelles ?

Avantages

• Les batteries virtuelles ne nécessitent pas de recourir à un installateur RGE, ce qui peut séduire des particuliers désireux d’installer leurs panneaux eux-mêmes. Cependant, cela n'est pas conseillé en raison des risques de chute, des risques électriques, ainsi que des complications liées aux garanties et à la maintenance ;
• la durée du contrat de revente à EDF OA est limitée à 20 ans et n’est pas renouvelable. Pourtant, la durée de vie des installations photovoltaïques dépasse facilement 30 ou 40 ans selon les marques de panneaux. Par exemple, Hello Watt installe des panneaux DualSun garantis 30 ans, ainsi que des panneaux SunPower garantis 40 ans (produit, service et performance). 
  Et la performance reste importante même après trois décennies. Des tests récents sur les premiers panneaux solaires français raccordés au réseau en 1992 ont montré qu’ils produisent encore 79,5 % de leur puissance initiale !

Inconvénients

Les systèmes de stockage virtuel proposés par JPME, Urban Solar Systems et MyLight Systems ont trois principaux points négatifs : 

• ils n’ouvrent pas droit à la prime à l’autoconsommation versée par l’État, réservée uniquement aux contrats conclus avec EDF OA ;
• ils obligent les clients à choisir ces entreprises comme fournisseurs d’énergie, limitant la possibilité de faire jouer la concurrence lorsqu’il existe des offres plus compétitives sur le marché ; 
• les offres et forfaits proposés varient régulièrement, et ne permettent donc pas de garantir des revenus compétitifs à long terme pour le client.

Comparaison des coûts des offres de batteries virtuelles d’Urban Solar Energy, MyLight Systems et JPME

Urban Solar Energy

Urban Solar Energy, fournisseur d’électricité 100 % renouvelable créé en 2018, propose une offre de stockage virtuel sans engagement, illimitée dans le temps et en volume.

Les coûts à prendre en compte sont : 

• des frais de mise en service de 199 € (comprenant les démarches de raccordement auprès d’Enedis) ; 
• 1 € par kWc par mois HT ; 
• les taxes (acheminement, etc.) ; 
• l’abonnement à Urban Solar Energy comme fournisseur d’électricité (prix indexés sur le tarif réglementé de l’électricité). 

MyLight Systems 

MyLight Systems, créé en 2012, propose également une offre sans engagement, avec une capacité de stockage limitée. Voici les coûts à prendre en compte : 

• un kit de démarrage à 960 € HT ; 
• l’abonnement TTC dont le prix varie en fonction du stockage souhaité ; 
• les taxes (acheminement, etc.) ; 
• l’abonnement à MyLight System comme fournisseur d’électricité. 

L’avantage de l’offre de MyLight System est de pouvoir choisir sa dimension de stockage : vous payez moins cher si vos besoins sont moins importants. Cependant, cela implique de bien dimensionner ses besoins de stockage, et donc de connaître précisément son taux autoconsommation, afin de ne pas risquer une perte du surplus lorsque la capacité est atteinte. 

JPME

JPME, acronyme de “Je produis mon électricité”, initialement spécialisé dans l’installation de panneaux solaires à sa création 2009, est devenu fournisseur à partir de 2016. Il propose des offres de batterie virtuelle sans engagement et sans limite de stockage. De plus, JPME propose de racheter à 4 centimes le kWh le surplus non utilisé stocké dans la batterie à la fin de l'année. 

JPME propose également une offre de portabilité moyennant 150 €, permettant d’envoyer son électricité vers un autre site, ce qui est pratique en cas de résidence secondaire. Sa particularité est de proposer une facturation annuelle avec déduction de la consommation sur la facture d’électricité. 

Les coûts à prendre en compte sont : 

• les frais d’inscription (minimum 699 €) ; 
• les taxes (acheminement, etc.) ; 
• des frais d’abonnements semblent être appliqués (autour de 1 € par kWc par mois), mais il est difficile d’obtenir des informations claires à ce sujet (nous ne les avons donc pas inclus dans nos calculs) ; 
• l’abonnement à JPME comme fournisseur (annuel, avec déduction de l’énergie stockée). 

Conclusion : batteries virtuelles versus EDF OA, rentabilité similaire mais fiabilité inférieure

Notre étude montre que les batteries virtuelles commercialisées par JPME et Urban Solar Energy sont actuellement aussi rentables que la revente du surplus à EDF OA, mais qu’il s’agit d’une solution beaucoup plus risquée.

Avant de choisir une batterie virtuelle, il est important de prendre en compte l’évolution rapide des technologies liées aux énergies renouvelables, notamment dans le domaine du stockage. Les prix des batteries physiques pourraient ainsi fortement diminuer dans les années à venir. Le marché du photovoltaïque évolue rapidement et dépend de politiques globales, notamment en matière d’investissements et de tarifs. 

EDF OA est fiable grâce au tarif fixe pendant 20 ans et permet de bénéficier de la prime à l’autoconsommation.

En revanche, opter pour une batterie virtuelle est plus complexe et les particuliers sont tributaires des prix de l’abonnement et des tarifs d’acheminement qui peuvent augmenter. De plus, le particulier est contraint de choisir son fournisseur de batterie virtuelle comme fournisseur d’électricité. Enfin, nous recommandons de ne pas souscrire à une offre de JPME : le Médiateur national de l’énergie a reçu plus de 100 plaintes à l’encontre de cette entreprise, aujourd’hui visée par une enquête de la Répression des fraudes.

Le choix entre le stockage virtuel et la revente dépend avant tout des spécificités du projet et du profil de consommation du foyer. Il est essentiel de calculer avec précision les besoins en kWh du foyer, en tenant compte de chaque poste de consommation, ainsi que d’une variable d'augmentation de la consommation électrique et de l’inflation dans les 20 prochaines années.

Choisir une batterie virtuelle est surtout avantageux pour des installations qui n’ont pas été réalisées par un technicien RGE, des panneaux au sol de forte puissance, ou encore pour les installations arrivées à la fin de leur contrat de 20 ans avec EDF OA.