Interview de Joël Mercy, président de GPPEP

Écrit par Sarah Nedjar, Rédactrice experte énergie le 13 juillet 2021 à 14:49 | Modifié le 17 mars 2022 à 16:26
Temps de lecture : 5 min

Joël Mercy est le président de l'association GPPEP (Groupement des particuliers producteurs d'électricité photovoltaïque). Découvrez dans cette interview, ses réponses aux questions qui touchent le secteur du photovoltaïque !

Portrait de Joel Mercy, président de GPPEP

Pour commencer pouvez vous nous présenter GPPEP en quelques mots et nous parler de votre rôle au sein de l’organisation ?

GPPEP est une association créée en 2009 par 4 citoyens dont je fais partie ; j’en suis par ailleurs le président depuis 10 ans. Onze ans ans plus tard, GPPEP compte plus de 12 000 bénévoles. Elle est membre des grandes instances parisiennes comme la CPB chez EDF OA, le CCP chez Enedis et administre des organismes délivrant les certificats RGE comme Qualit’Enr ou Qualifelec. 

Notre organisation a une double casquette : la promotion de la filière du photovoltaïque résidentiel et la protection de ses producteurs.
Joël Mercy, président de GPPEP

Sur votre site internet, vous vous présentez comme un accompagnateur et un soutien pour les personnes victimes de société éco-délinquantes. Pouvez-vous nous en dire plus sur ces organisations ? 

Les sociétés éco-délinquantes ont commencé à se développer en même temps que l’arrivée des aides de l’Etat, aux alentours des années 2008-2009. La première entreprise a avoir sévi sur le marché est BSP : elle a laissé plus de 3000 producteurs sur le carreau. Chez GPPEP, on se bat depuis 10 ans contre ce type d’entreprises, mais ce n’est que depuis un an que les autorités ou les organismes de la filière ont pris conscience de ce problème. Aujourd’hui, on ne compte que 90 000 auto producteurs en France, alors qu’il y en a plus de 2 millions en Allemagne, plus de 800 000 en Angleterre, 600 000 en Italie et en Espagne. C’est le problème typiquement français de l'éco-délinquance. Il faut l’éradiquer pour que demain, je l’espère, nous passions de 90 000 producteurs à plus de 2 millions en France.

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Selon vous, quel a été l’impact de l’année 2020 sur la filière photovoltaïque ? Au contraire, comment voyez-vous le marché du solaire en 2021 ? 

Nous sommes une structure neutre : nous n’achetons ni ne vendons rien. Tout ce que nous faisons, nous le faisons pour la beauté du geste, parce que nous sommes passionnés. Or, ce que nous constatons sur le terrain, c’est que l’année 2020 n’a pas impacté le travail des bons professionnels connus et reconnus de la filière. Au contraire, leurs carnets de commande sont pleins pour 2021, au point qu’ils doivent parfois refuser des clients !

Au GPPEP, nous ne pouvons qu’encourager les particuliers à se tourner vers les bons professionnels de proximité. En effet, choisir un artisan local de qualité c’est faire vivre son département ou sa région, c’est avoir la garantie d’avoir une installation sécurisée, et de produire là où on consomme.
Joël Mercy, président de GPPEP

Que pensez-vous de l’arrivée de certaines entreprises comme Ikea sur le marché du solaire (après EDF ou Engie et certains fournisseurs verts) ?

Ikea nous avait présenté son projet avant de venir en France. Je dois dire que j’étais un peu déçu de leur proposition. Venant d’une société avec de tels moyens financiers et industriels, je m’attendais à ce qu’elle nous propose des installations de 3 kWc aux alentours de 4000 € comme en Belgique, ce qui aurait été révolutionnaire. Malheureusement, leurs prix sont calqués sur ceux du marché en France, ce qui empêche de faire bouger le photovoltaïque comme c’est le cas dans d’autres pays. En France, les strates administratives font mécaniquement augmenter les prix. Passer en dessous de la barre des 2 euros watt-crête permettrait d’avoir davantage de panneaux photovoltaïques chez nous.

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Pensez-vous que les lourdes démarches administratives (déclaration préalable à la mairie, demande de raccordement, CONSUEL etc.) fassent partie des freins au développement du solaire chez les particuliers ?

Effectivement. Les organismes qualificateurs avec lesquels nous travaillons doivent appliquer des consignes qui émanent de l’Etat. Ces règles doivent à leur tour être suivies par les installateurs. Il est clair qu’il faut plus que jamais encadrer et protéger, mais d’une certaine manière, cet encadrement peut devenir rédhibitoire pour un particulier. Par ailleurs, beaucoup de charges classiques d’une société font monter le prix des installations. Aujourd’hui, on peut considérer que seule une élite peut se permettre d’investir dans le photovoltaïque pour faire baisser sa facture d’électricité.

joel mercy gppep solaire

Est-ce que, selon vous, les subventions actuelles du gouvernement aident suffisamment les particuliers à rentabiliser un projet solaire ? 

Nous sommes les premiers en tant que citoyens et bénévoles à dénoncer les aides de l'Etat. En effet, ces aides vont rarement dans la poche des citoyens et souvent dans la poche de personnes mal intentionnées. Le jour où ces aides disparaîtront, il ne restera sur le marché que les bons installateurs, ce qui fera mécaniquement baisser les prix. A titre d’exemple, en 2010, le crédit d'impôt était une aide de 8000 euros pour l’installation de panneaux solaires. En la supprimant, les prix des installations dans les mois qui ont suivi ont eux aussi chuté de presque 8000 euros.

Que pensez-vous de la politique publique d'accompagnement des particuliers pour des projets solaires en autoconsommation ? Est-ce une bonne idée de commencer à privilégier l'autoconsommation au détriment de la vente de la totalité de la production ? 

Je vais vous donner mon avis en tant que citoyen et non en tant que président de GPPEP. Je trouve que faire de l'auto consommation est beaucoup plus vertueux que la vente en totalité. Cette dernière a été créée au départ pour amorcer la machine. Malheureusement, beaucoup de personnes en ont profité. En 2015, GPPEP se projetait déjà au-delà de la vente en totalité car nous savions que cela ne durerait qu’un temps. Nous ne travaillons maintenant plus uniquement sur l’aspect financier mais aussi sur l’aspect écologique et sur les questions de transition énergétique. L’auto consommation est un concept qui plaît énormément aux particuliers car c’est plus concret.

Je compare souvent l'énergie potagère à un plan de tomates que l’on cultive chez soi. Manger ses propres tomates est toujours plus agréable que de consommer celles d’un supermarché. C’est la même chose avec l’autoconsommation. L’énergie qu’on produit soi-même est plus verte que le plus vert des fournisseurs.
Joël Mercy, président de GPPEP

Quelle est votre position sur le stockage de batteries lithium à l’échelle du résidentiel ? 

C'est un sujet de discussion qui existe depuis plusieurs années. En tant que citoyen, investir dans l’autoconsommation, c’est investir dans la diminution de sa facture d’électricité. Or, aujourd’hui, le prix de l’électricité est très faible en France (moitié moins qu’en Allemagne). Le prix du stockage est donc peu attractif ! Reparlons en dans 4 ou 5 ans, lorsqu’il y aura de plus en plus de batteries, cela devrait faire descendre les prix. Mais aujourd’hui, pour avoir un bon système de stockage, il faut compter environ 5000 euros. Ce n 'est pas à la portée de toutes les bourses.

L’Allemagne est largement en tête du classement Européen en ce qui concerne la production photovoltaïque. Comment expliquer ce relatif retard français ?

Je pense que l'éco délinquance est un des plus gros freins pour le développement du photovoltaïque en France. Mais ce problème existe ailleurs. Il a franchi la frontière des panneaux solaires pour se reporter sur l'isolation à 1€ et la PAC à 1€ (là où on recense le plus de délinquance). En supprimant les aides, en encadrant un minimum, on peut faire comme en Allemagne et en Angleterre. Les anglais n’ont pas un meilleur ensoleillement que nous mais ils ont 8 fois plus d'auto-consommateurs qu’en France.

interview Joel mercy gppep europe

Début avril, Jean Castex a assuré que le gouvernement travaillait sur le renforcement de la filière solaire française et préparait une stratégie d’industrialisation nationale et européenne. Pensez-vous que l’Etat soit en mesure de tenir ces objectifs ambitieux ?

La filière française a fait beaucoup d’efforts, elle est mature. Les prix sont cohérents, les professionnels sont bons. Si on traite le problème de l’éco délinquance à la racine, elle peut se développer très rapidement. Le tout, c’est de redonner confiance dans la filière.

Parler des arnaques est important, c’est un moyen d’alerter les concitoyens, mais il faut aussi parler des professionnels passionnés, retrouver confiance dans les énergies renouvelables et le photovoltaïque.
Joël Mercy, président de GPPEP
Sarah Nedjar

Sarah Nedjar

Rédactrice experte énergie

Après une classe prépa lettres et l'obtention d'un Master en management interculturel, Sarah rejoint Hello Watt en 2021. Elle rédige des contenus (articles de blog, newsletters, communiqués de presse) sur l'actualité du marché de l'énergie.

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